Voilà des décennies que les écologistes et les scientifiques exposent leurs méfaits sur l’environnement. Syngenta, Monsanto, Bayer ou encore Dow, ces multinationales de l’agrochimie inondent notre alimentation, notre eau et nos campagnes de leurs pesticides. Les équipes de Cash Investigation vont, à nouveau, mettre le doigt où ça fait mal, en exposant cette industrie mortifère et ses conséquences dramatiques sur la santé publique, désormais avérées.

65 000 tonnes, c’est la quantité de pesticides écoulée en France chaque année. Une quantité astronomique qui place l’hexagone en tête de liste des consommateurs de produits phytosanitaires en Europe. Un appétit malsain dont notre environnement se passerait volontiers. Plus grave encore, les équipes de Cash Investigation vont mettre en évidence le lien entre cette surconsommation d’intrants chimiques et la dégradation de la santé publique, dont principalement celle des enfants. En effet, chaque jour, ceux-ci seraient en contact avec les molécules volatiles du Folpel (best-seller du géant Bayer), un pesticide classé cancérogène probable par l’EFSA en 2009. Il est pourtant toujours largement commercialisé aux côtés du glyphosate (Roundup) jugé probablement cancérogène par l’OMS en 2015.

Au-delà des débats d’experts, cette industrie semble déjà se traduire par des pertes considérables en vie humaine. En effet, on sait que les cancers infantiles augmentent de 1% chaque année en France. Ceci représente 2 500 nouveaux malades annuels, sacrifiés sur l’autel du productivisme. Mais peut-on vraiment lier cette augmentation à l’exposition aux pesticides ? C’est précisément à cette épineuse question que l’enquête de Cash Investigation tente de répondre. Et à ce titre, les recherches laissent relativement peu de doute. En effet, la population serait largement exposée à des molécules aux risques sanitaires aujourd’hui avérés, qui polluent eau, air, sols et aliments. Les départements de la Gironde, de la Marne et de la Loire-Atlantique arrivent largement en tête du classement, avec des ventes de pesticides dangereux trois fois et demie supérieures à la moyenne de l’ensemble des départements français.

Depuis les vignobles du Bordelais jusqu’en Californie en passant par Hawaï où ont lieu de dangereuses expérimentations, les journalistes de Cash Investigation délogent les géants de l’agrochimie et les placent devant leurs responsabilités, en interviewant des scientifiques qui sonnent l’alarme. Mais ces révélations suffiront-elles à influencer une industrie qui pèse plus de 50 milliards de dollars ? Côté affaires, le reportage choc n’aura pas même effleuré l’industrie chimique malgré sa forte médiatisation. Bien au contraire, le 3 février, la côte boursière de Syngenta s’envolait après l’annonce d’un potentiel rachat par le groupe ChemChina à hauteur de 43 milliards de dollars. Aucune valeur des entreprises épinglées n’a sourcillé suite à la médiatisation du reportage. Il semblerait qu’aux yeux du marché et des investisseurs, l’agrochimie reste un secteur d’avenir. Jusqu’à quand l’agriculture intensive, profitant avant tout aux géants de l’agroalimentaire et de la pétrochimie, pourra-t-elle justifier le sacrifice croissant de vies humaines, qui plus est celles de nos enfants ? Jusqu’à quand les consommateurs et les paysans seront-ils victimes de cette course au profit sans limite, sur fond de corruption et de conflits d’intérêts, alors que l’agroécologie est parfaitement capable de nourrir le monde ?

On notera enfin que la sortie du reportage coïncide avec la publication du livre Toxic, aux éditions Les Arènes. Un ouvrage, signé des journalistes Martin Boudot et Antoine Dreyfus, qui constituera un supplément d’informations vital pour comprendre les enjeux qui entourent l’industrie agrochimique et toute la nécessité d’embrasser la transition agroécologique sans attendre.